Synaxe des douze apôtres juin 2019

 Dans l’extrait de l’épître aux Romains d’aujourd’hui, l’apôtre Paul énonce une vérité dont il est souvent question ici – « ce ne sont pas ceux qui écoutent la loi qui sont justes devant Dieu, mais ceux qui la mettent en pratique » – écrit-il. Pour nous, la loi – ce sont les dix commandements qui sont communs aux chrétiens et aux Juifs, mais pas les 613 commandements spécifiques au judaïsme. Et ces dix commandements se résument en deux – « tu aimeras Dieu et tu aimeras ton prochain comme toi-même ». L’apôtre Paul précise que ceux qui mettent la loi en pratique, naturellement, sans le savoir, seront reconnus comme justes le jour du Jugement dernier. Quand un athée ou un non chrétien aime sincèrement son prochain, il aime Dieu, sans en être conscient.

Mais accorder la priorité à son prochain que l’on voit, et à Dieu que l’on ne voit pas, est tout sauf évident. Cela implique que l’on ne juge pas, que l’on pardonne et, surtout, que l’on acquière l’humilité, sans laquelle tous les efforts fournis pour atteindre la perfection sont réduits à néant. C’est ce qu’explique Jean de Valaam dans presque chacune des lettres adressées à ses enfants spirituels. Jean de Valaam est un moine qui a vécu de 1873 à 1958, d’abord en Russie, puis en Finlande et vient d’être canonisé par l’Eglise orthodoxe de Finlande.

Les Pères de l’Eglise ont défini toutes les passions qui nous assaillent. Et tous disent que la pire d’entre elles, celle qui est à l’origine de toutes les autres, et de tous les conflits est l’orgueil. A chaque passion – les occidentaux parlent de péché capital – correspond une vertu. Ceux que cela intéresse liront avec intérêt « la thérapeutique des maladies spirituelles » de Jean-Claude Larchet, une compilation exhaustive de l’enseignement des Pères de l’Eglise sur les passions, en plus de 800 pages.

A la passion de l’orgueil correspond la vertu de l’humilité. Saint Jean de Valaam insiste beaucoup sur cette vertu. « Sois humble en permanence, ne te fie pas à toi-même, – écrit-il, nous devons peiner pour chaque vertu, mais le succès de nos efforts dépend de la grâce divine. C’est en réponse à l’humilité et non à l’ascèse, que Dieu accorde Sa grâce. Plus l’homme s’humilie (c’est-à-dire est humble et conscient de son imperfection), plus la grâce le visite ». Saint Jean reprend une citation du prophète Ezéchiel 18, 21-32, en la simplifiant : « Si le pécheur se repent et se met à vivre selon la justice (selon la Loi), alors le Seigneur ne Se souviendra plus de ses péchés ; de même pour le juste, s’il tombe dans la corruption (dans le péché), le Seigneur ne Se souviendra plus de sa justice ». Il convient de rajouter – s’il persiste dans l’erreur – sinon tous seraient condamnés. Saint Jean ajoute que « même chez les saints, les défauts naturels demeurent – cela pour leur humilité », et pour rassurer, il ajoute : « Ne t’imagine pas Dieu, très sévère. Il est très miséricordieux et connaît notre faiblesse humaine ». Saint Isaac le Syrien va encore plus loin quand il affirme que tous « nos péchés sont comme une poignée de sable submergée par l’océan de la mansuétude de Dieu ». Cela n’empêche pas de devoir fournir des efforts.

Soyons conscients de ce que, sur le plan spirituel, rien n’est acquis définitivement, que l’on n’est jamais à l’abri d’une chute et que ces chutes peuvent même être positives quand elles empêchent de sombrer dans l’autosatisfaction, dans l’orgueil.

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