Parabole du semeur

Parabole du semeur       

La parabole du semeur est citée dans les trois Evangiles synoptiques – ceux de Matthieu, Marc et Luc. Dans les trois versions, le Christ donne à Ses disciples les clefs pour qu’ils la comprennent, même s’ils sont censés y parvenir tout seuls, puisque le Christ dit aussi « qu’il est donné aux apôtres de connaître les mystères du Royaume de Dieu, alors que les autres  » doivent se contenter de paraboles « pour qu’ils voient sans voir et qu’ils entendent sans comprendre ». La citation exacte du prophète Esaïe est « Ecoutez bien, mais sans comprendre, regardez bien, mais sans reconnaître ». La prophétie s’applique aux foules qui ont écouté et suivi le Christ, elle s’applique à nous qui leur avons succédé, mais aussi aux apôtres qui ont tout vu, tout entendu, qui ont eu droit à des explications supplémentaires destinées à enraciner leur foi, mais n’ont tout compris que par étapes: ils ont compris un peu avant la Crucifixion, un peu plus après la Résurrection, et enfin, tout, à la Pentecôte. Car sans l’aide de l’Esprit qui nous souffle les explications et nous aide à les intégrer, nous sommes incapables de comprendre quoi que ce soit tout seuls, que l’on soit apôtre ou croyant de base.

            Pour en revenir à la parabole, elle nous concerne à tous les niveaux. Il nous arrive d’être « au bord du chemin », nous sommes alors « ceux qui entendent, puis vient le diable et il enlève la parole de notre cœur de peur que nous croyions et soyons sauvés ». Il nous arrive d’entendre, mais de ne pas écouter. Nous péchons par inattention. Ou bien nous n’écoutons pas parce que, si nous le faisions, nous nous sentirions obligés de modifier notre comportement, nous devrions changer de vie, alors que notre vie de pécheurs nous convient et semble bien confortable.

Nous sommes aussi « des pierres quand nous accueillons la parole avec joie, mais n’avons pas de racines: nous croyons pendant un moment, mais dès qu’une tentation nous assaille, nous abandonnons ». Nous manquons de constance dans nos efforts. Nous sommes attentifs à la Parole quand Elle ne contrarie pas nos plans., quand elle ne bouscule pas nos habitudes. La Parole est reçue et assimilée quand nous sommes disposés à l’entendre et l’écouter en permanence, à travers tous les différents signes que nous fait parvenir l’Esprit.

Nous sommes aussi les épines, « ceux qui écoutent, mais que les soucis, les richesses et les plaisirs de la vie étouffent, et nous ne parvenons pas à la maturité ». C’est là que se pose un problème majeur, celui des priorités. Nous n’atteindrons la maturité spirituelle qu’en inversant l’ordre des priorités qui nous est malheureusement naturel et qui ne place ni Dieu, ni notre prochain à la première place de nos préoccupations. Vu de l’extérieur, nous vivons souvent comme des païens et ne sommes chrétiens que le dimanche matin.

            Nous devrions être attentifs à la parole de Dieu, lire le plus souvent possible les Evangiles, les Actes des apôtres, les épîtres, sans nous contenter d’en écouter, d’une oreille plus ou moins attentive, les courts extraits lus le dimanche, car c’est insuffisant. Nous devrions aussi écouter avec attention et assimiler toutes les paroles prononcées ou chantées dans les liturgies de saint Jean Chrysostome et de saint Basile. Ce sont des leçons de théologie à la portée de tous. Notre réceptivité dépend de nous. Si nous le désirons vraiment, nous serons aidés par l’Esprit. Ceux qui n’ont jamais été attirés par les études n’ont pas moins de chances de les comprendre que des hyper-intellectuels mal disposés. Nous devrions aussi écouter les stichères chantées au cours des vêpres – elles résument l’essentiel des grandes comme des petites fêtes, des fêtes majeures, comme celles des saints du jour – et chaque dimanche est au minimum une commémoration, les théologiens disent un mémorial, de la Résurrection que nous revivons dans le cadre de l’éternité où le présent, le passé et l’avenir se confondent. L’office des vêpres est court. C’est une des préparations à la liturgie que l’Eglise nous propose. Il est regrettable que sa fréquentation soit aussi confidentielle.

Il ne faudrait pas que la communion soit banalisée et qu’elle devienne automatique. C’est un risque que nous courons dans nos paroisses francophones et certaines paroisses slavophones ou hellénophones d’avant-garde, où par réaction aux quatre ou cinq communions annuelles ou, pire, à la seule communion de la nuit de Pâques, nous sommes passés à la communion hebdomadaire.  Une communion systématique à chaque liturgie, sans aucune préparation minimale peut être dangereuse et contre-productive. Elle est dangereuse parce que le sentiment d’autosatisfaction, le sentiment du devoir accompli, alors qu’il ne l’est manifestement pas, sont des catastrophes spirituelles. Ce sont des manifestations de l’orgueil dont tous les pères de l’Eglise disent que c’est la pire des passions. Sans aucune préparation, la communion est contre-productive, parce que nous croyons bien faire, alors que ce n’est pas le cas et nous régressons sur le plan spirituel. Nous ne serons jamais dignes de communier aux Saintes Espèces, mais nous devons en être conscients et approcher du Calice « avec foi, amour et crainte de Dieu ». La foi est celle que nous devons avoir en la miséricorde divine, sans laquelle nous serions tous condamnés. Nous ne méritons rien. Même si nous accomplissions le minimum, nous resterions « les serviteurs quelconques » de l’Evangile de Luc, des serviteurs qui n’ont fait que leur devoir. L’amour, c’est celui que nous devons avoir les uns pour les autres et l’amour pour Dieu, accompagné de reconnaissance pour le sacrifice du Christ et pour cette invitation à laquelle nous nous sommes rendus. Le mot « crainte » doit être pris dans le sens de respect. Nous ne respectons pas Dieu quand nous nous rendons à Son invitation, sans aucune préparation. Et il ne serait pas mauvais d’éprouver ne serait-ce qu’une petite crainte, au sens habituel du mot, en raison de notre indignité, en raison de la distance qui nous sépare de Dieu par notre faute. En résumé, soyons chrétiens avec et dans la joie, mais avec sérieux, sans toutefois nous prendre nous-mêmes au sérieux. L’humour n’est pas interdit dans l’Eglise. Ne sombrons pas dans le désespoir à la vue de nos fautes et de notre imperfection, mais n’oublions jamais « qu’il ne suffit pas de dire – Seigneur, Seigneur ! – pour entrer dans le Royaume des cieux; il faut faire Sa volonté ».

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