dimanche de tous les saints

Dimanche de tous les saints de Russie et de France Mt 4, 18-24 Ro 2, 10-16

Le concile de Moscou de 1918, dont notre Archevêché est d’une certaine façon l’héritier, a institué une fête commémorant tous les saints qui se sont illustrés sur la terre de Russie au sens large, puisque la Russie impériale s’étendait sur un territoire encore plus vaste que celui de l’Union Soviétique. Les paroisses de notre Archevêché, réparties dans différents pays d’Europe, ont ajouté à cette commémoration les saints du pays où elles se trouvent. Notre communauté étant pluriethnique, nous adjoindrons les saints serbes et roumains aux saints français et russes.
Le 20 août 2000, l’Eglise russe a canonisé ses martyrs connus ou inconnus du 20-ème siècle. Leur nombre est estimé à plusieurs centaines de milliers. En 2011, une liste de seulement 1774 martyrs, dont les noms sont connus, a été proposée à la vénération des fidèles. Une commission continue les recherches, complète les hagiographies, c’est à dire les biographies des néo-martyrs, et essaie de trouver des photos ou des portraits d’eux qui serviront de base pour que des iconographes puissent les représenter. Juste une parenthèse sur l’utilisation du verbe « peindre » pour les icônes. Le verbe « écrire » en russe contemporain correspond au verbe « peindre » en vieux russe et en slavon, car les manuscrits, que ce soit les enluminures ou les textes étaient peints. Il est donc parfaitement légitime d’utiliser le verbe « peindre » pour les icônes.
La vénération des néo-martyrs, qu’ils soient grecs, russes, serbes, roumains ou du Moyen-Orient est très importante. Au cours des conversations qu’il a eues avec Olivier Clément en 1969, le patriarche de Constantinople Athénogoras a prononcé des phrases prémonitoires, alors que la Russie était soviétique et semblait devoir l’être encore longtemps : « le christianisme russe, – a-t-il dit, par son holocauste, a non seulement protégé les chrétiens d’Occident, mais il a fécondé l’histoire par le sang de ses innombrables martyrs. (…) Le véritable dépassement (…) ne s’obtient que par la prière. Et c’est bien ce qui est en train de se passer en Russie, sans qu’on s’en rende compte. Les chrétiens russes ont vaincu le totalitarisme dans leur pays. Ils l’ont vaincu par leur foi, par leur prière, par la souffrance des confesseurs et des martyrs, avec l’aide qui se précisera à l’avenir, du renouveau spirituel et théologique de l’Orthodoxie russe du 19-ème et du début du 20-ème siècle. Peu à peu, par leur humilité, leur amour de la patrie, leur présence de prière et de service dans la société soviétique, ils triomphent, par l’intérieur, des aspects sombres, des aspects idolâtriques du communisme.
Leur victoire, on ne la voit pas encore. Bien des choses pesantes s’attardent à la surface de l’histoire alors que tout est déjà changé en profondeur ».
Ces paroles prophétiques ont été prononcées en pleine période brejnévienne, vingt ans avant la chute du Mur de Berlin. Le Mur avait commencé à se fissurer bien avant 1989.
Si le nombre de martyrs russes du 20-ème siècle a battu tous les records de la chrétienté, nous pouvons leur adjoindre les 800 000 néo-martyrs serbes de la période de la Seconde guerre mondiale, exterminés par les oustachis croates au camp de Jasenovac et dans de nombreux autres lieux. Ces martyrs avaient eu le choix d’apostasier, de renoncer à leur religion et devenir catholiques ou d’être exécutés. L’Eglise serbe les commémore le 13 septembre. A ces martyrs s’ajoutent ceux plus récents du Kosovo et tous les néo-martyrs roumains de la période communiste, les néo martyrs grecs de la longue période de l’occupation ottomane et tous les martyrs actuels du Moyen-Orient ou d’Egypte.
Mais aujourd’hui, nous ne fêtons pas que les martyrs. Nous fêtons aussi tous les autres saints de nos patries respectives et ceux du pays où nous vivons. Quand on consulte le calendrier orthodoxe édité par la Fraternité, l’on constate qu’un grand nombre de saints occidentaux sont communs aux catholiques et aux orthodoxes. Nous reconnaissons tous ceux qui ont été canonisés avant la séparation des Eglises. La ville de Saint Prix porte le nom de l’évêque martyr dont nous pouvons vénérer l’icône dans notre chapelle. Ses reliques sont conservées dans l’église catholique de la ville-basse. Nous entretenons des relations très amicales avec les prêtres catholiques qui desservent les églises de Saint-Prix. Cela nous a permis de participer à un pèlerinage conjoint en janvier 2013. Après un office d’intercession orthodoxe, un molébène à notre saint commun, célébré dans la chapelle catholique du bas-village, nous avons accompagné les reliques portées en procession à l’église du vieux village. Ce pèlerinage n’a pas eu lieu cette année, mais nous avons le projet d’en organiser un nouveau au début de l’année prochaine, le dimanche 25 janvier, jour de la fête du Saint. La séparation de nos Eglises sera atténuée le temps d’une commémoration commune.
Soyons enfin conscients de ce que nos liturgies dominicales, ces anticipations du Royaume, sont une Pâque hebdomadaire, puisque nous fêtons la Résurrection du Christ tous les dimanches, et une commémorons de la Cène, du dernier repas du Christ avec Ses apôtres, avant la crucifixion. Notre commémoration de la Cène réunit tous les saints, tous ceux qui « appartiennent à Dieu », puisque c’est une des définitions du mot saint. Notre Cène réunit les vivants, comme les défunts, les justes qui ont eu une vie exemplaire, et dont la sainteté est reconnue et qui sont proposés comme modèles par l’Eglise, comme les pécheurs. Elle réunit tous ceux qui sont mentionnés au cours de la proscomédie, tous ceux dont les noms figurent sur les dyptiques que les fidèles apportent à la Table de préparation, ainsi que tous ceux qui « n’ont pas été mentionnés par manque de temps ou en raison de notre faiblesse » – ce sont les mots qui sont prononcés par le prêtre.
Au cours de la liturgie, c’est l’Eglise, tout entière, la terrestre et la céleste qui rend grâces à Dieu.

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