4-ème dimanche de carême

4-ème dimanche de carême Hb 6, 13-20 Mc 9, 17-31 Ep 5, 9-19 Mt 4, 25-5, 12

Une version écrite d’une prière pénitentielle vous a été proposée il y a quelques années, une prière inspirée de celle du père Vladimir Lapchine, qui lui-même s’est inspiré du père Alexandre Men’ dont il a été un fils spirituel. Dans les trois versions, l’on part de la même constatation. Nos problèmes spirituels trouvent leur source le plus souvent dans notre manque de foi.
Si nous étions conscients de la présence de Dieu, si nous sentions Son regard en permanence, si nous avions cette foi, même plongés dans le monde, après être sortis de l’église, nous n’oserions plus pécher. Ce « nous » recouvre tous les hommes, depuis les apôtres jusqu’à nous-mêmes. Judas a vendu le Christ, deux apôtres ont revendiqué les premières places auprès du Messie, saint Pierre L’a trahi à trois reprises, et a failli se noyer par manque de foi, saint Paul faisait le mal qu’il abhorrait et ne faisait pas le bien auquel il aspirait de toute son âme. Si les gens qui suivaient le Christ, si ceux qui L’entouraient du matin au soir, pouvaient pécher, avant et, peut-être un peu moins, après la Résurrection, alors que dire de nous ?
Dans l’Evangile de Marc de ce dimanche, le Christ guérit un enfant possédé. Le père de cet enfant a commencé par s’adresser aux apôtres qui ont essayé sans succès de chasser eux-mêmes le démon. Il s’en est suivi une discussion animée entre la foule, les scribes et les apôtres. Le père de l’enfant s’est alors adressé directement au Christ et a reformulé sa requête : « Si Tu peux quelque chose, viens à notre secours, par pitié pour nous ».
Dieu peut tout faire et Il a pitié des hommes. Mais quand nous demandons Son intervention, nous devons croire qu’elle est possible. « Tout est possible à celui qui croit » – répond le Christ. Et le père de l’enfant résume alors son état spirituel avec des mots que nous pouvons tous reprendre à notre compte : « Je crois, Seigneur, viens au secours de mon manque de foi ». Nous qui sommes ici, nous avons tous envie de croire, mais il arrive que notre foi soit gangrénée par le doute, ou, en tout cas qu’elle soit insuffisante. La guérison de l’enfant a été obtenue à la fois par l’humilité du père, et par sa façon de s’en remettre entièrement, avec confiance et espoir, à Celui dont il ne savait pas encore qu’Il était le Fils de Dieu. Et le Christ dira aux apôtres, déroutés par leur échec personnel, que les miracles ne peuvent être accomplis que grâce à la prière ; l’évangéliste Matthieu ajoute le jeûne dans sa version du récit. Les apôtres ont manqué de foi et n’ont pas assez prié.
L’apôtre Jacques insiste, au début de son épître, sur l’importance de la foi : « Si la sagesse fait défaut à l’un de vous, – écrit-il, qu’il la demande à Dieu qui donne à tous avec simplicité et sans faire de reproche : elle lui sera donnée. Mais qu’il demande avec foi, sans éprouver le moindre doute ; car celui qui doute ressemble à la houle marine, que le vent soulève. Qu’il ne s’imagine pas que le Seigneur donnera quoi que ce soit à un homme partagé, fluctuant dans toute ses démarches ».
Nous voilà avertis !
Cette foi, nous devons l’avoir aussi pour comprendre le bien-fondé du Sermon sur la Montagne rapporté dans l’évangile de Matthieu d’aujourd’hui, car tout ce qui nous y est recommandé va à l’encontre de nos tendances naturelles. Notre civilisation occidentale était marquée par le christianisme et ses valeurs jusqu’au début du 20-ème siècle – ces valeurs sont maintenant décriées, ridiculisées, et les observer est aux yeux du monde un signe de faiblesse, ou même de bêtise. Dans notre monde, il faut être riche et puissant, le bonheur individuel est la priorité des priorités, et qu’importe s’il est obtenu au détriment des autres. Le prochain devient alors un instrument qui permet d’assurer ce bonheur.
Tout dans les Béatitudes que nous avons entendues deux fois aujourd’hui, chantées, puis lues, tout dans l’ensemble du message évangélique s’oppose à la recherche de la satisfaction égoïste des besoins personnels. Le bonheur n’est pas là où nous le souffle le Malin. Nous avons besoin de la foi pour le comprendre et adhérer à l’esprit et à la pratique des Béatitudes. Sans notre adhésion, Dieu ne peut rien pour nous, car Il respecte notre liberté.
Qui peut trouver le bonheur dans la pauvreté intégrale, quand on n’est esclave de rien dans les domaines matériel, intellectuel et spirituel ?
Qui est capable de tendre sa joue droite, ou en tout cas, refuse de rendre coup pour coup ?
Qui estime que nager dans le bonheur matériel, n’est pas la source du vrai bonheur ?
Qui accorde la priorité absolue à l’obéissance à Dieu, au respect de Ses commandements, préférant à tout le reste ce qu’en Eglise on appelle la justice ?
Qui ne juge jamais son prochain et pardonne systématiquement, sans arrière-pensée ?
Qui a une âme d’enfant et ne voit le mal nulle part, parce qu’il a lui-même l’âme pure ?
Qui cherche à rapprocher les gens au lieu de colporter des rumeurs et des calomnies et attiser les discordes avec volupté ?
Qui est prêt à souffrir vraiment pour le Christ ; qui est prêt à ne pas Le trahir, ne serait-ce que par le silence, dans une société où l’on raille ceux qui se disent Ses disciples ?
Qui est capable de tout cela ?
En est capable celui qui se fixe la recherche de la perfection pour but et règle sa vie sur les recommandations énoncées dans le Sermon sur la Montagne.
Profitons du carême pour revenir aux normes qui feront de nous des disciples fidèles du Christ. Et même si nous pensons, comme les apôtres, que c’est impossible, n’oublions jamais que, comme le Bon larron, comme le père de l’enfant possédé de l’évangile d’aujourd’hui, comme le Fils prodigue de la parabole, nous pouvons compenser nos insuffisances chroniques, notre manque de foi, par une véritable et profonde humilité, quand on prend conscience de son véritable état spirituel, et par la confiance en la mansuétude divine.

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