La commémoration des défunts.

Nous avons célébré hier les obsèques de notre archevêque, Monseigneur Gabriel, tandis que l’Eglise catholique et ses fidèles commémoraient les défunts, le lendemain de la Toussaint de leur calendrier, le lendemain de leur fête de tous les saints.
Dans notre Eglise, nous fêtons tous les saints à un autre moment : le 1-er dimanche après la Pentecôte, et dans les communautés de tradition russe, ce qui est notre cas, nous fêtons plus spécialement les saints de la terre de Russie et ceux du pays où l’on vit, le dimanche suivant. Rien ne nous empêche de mentionner également les saints serbes et roumains.
En revanche, pour ce qui concerne les défunts, nous les commémorons collectivement 8 fois dans l’année et nous commémorons nos défunts, ceux qui nous sont plus proches, le jour anniversaire de leur décès, et le jour de la fête de leur saint patron.
Nous les commémorons en célébrant des panykhides et parfois en ajoutant une litanie des défunts au cours de la liturgie. Cela ne se fait pas, en principe, le dimanche, car rien ne peut dépasser la liturgie qui englobe tout. Mais aujourd’hui, ce sera le neuvième jour du rappel à Dieu de notre archevêque et nous ferons une exception.
Nous commémorons aussi nos défunts à chaque liturgie à la proscomédie, quand vous apportez vos prosphores et votre dyptique, la liste des personnes que vous voulez associer à la liturgie. Une parcelle est prélevée pour chaque vivant et chaque défunt que vous avez mentionné. Un peu avant la fin de la liturgie, le célébrant verse ces parcelles dans le calice en demandant à Dieu de laver de leurs péchés les vivants, comme les défunts qui ont été mentionnés.
Les offices des défunts, que ce soient les funérailles ou les panykhides, sont, avec ceux du Grand-Carême, les plus beaux de tous nos offices. Ils ont une fonction apaisante pour ceux qui les demandent et nous pensons qu’ils apportent un soutien à nos défunts.
Une partie de la chrétienté occidentale ne prie pas pour les morts. Il convient donc d’expliquer pourquoi, catholiques, orthodoxes et anglicans, nous prions pour nos défunts.
A chaque office de funérailles, dans les quelques phrases qu’il est d’usage de prononcer à la fin de l’office, il est important de mettre l’accent sur le côté paradoxal de la mort qui est à la fois une catastrophe et une bénédiction. C’est une catastrophe, parce que les séparations sont toujours tristes, c’est une catastrophe, parce que les derniers instants peuvent être pénibles et angoissants pour celui qui part, comme pour ceux qui restent. Et nous n’avons pas à avoir honte de nos larmes et de notre appréhension, elles sont naturelles. Le Christ complètement Dieu, mais aussi complètement homme, le Christ, Lui-même, a éprouvé un sentiment de grande tristesse et a pleuré à la mort de son ami Lazare. Le Christ, Lui-même a éprouvé de l’angoisse et a versé des larmes de sang avant Sa Passion – est-il écrit dans les Evangiles.
Mais la mort est aussi une bénédiction. A partir d’un certain âge, nous commençons tous à avoir des problèmes de santé plus ou moins importants. Imaginons dans quel état nous serions si nous vivions déjà deux cents ou trois cents ans. Ce serait une véritable torture, qui deviendrait une souffrance en croissance exponentielle, si nous vivions éternellement.
D’autre part, la mort, pour un croyant n’est qu’une séparation qui peut nous paraître longue, mais qui est provisoire. Et la mort physique est une nouvelle naissance. Dans notre tradition, nous disons que le défunt est « né au ciel ». Monseigneur Kallistos Ware, un évêque orthodoxe britannique, ajoute que « la mort est une porte qui s’ouvre vers notre re-création ».
Il veut dire que la mort est le passage obligé pour notre résurrection âme et corps réunis, l’âme réintégrant un corps transfiguré. Nous ne savons pas trop comment cela se fera, et à quoi nous ressemblerons, mais cela se fera. Les apôtres n’ont pas reconnu tout de suite le Christ ressuscité, le Christ revenu parmi les apôtres dans Son corps transfiguré.
Tous nos théologiens, tous les pères de l’Eglise insistent sur la solidarité entre les vivants et les défunts, qui continuent de vivre différemment. Notre Dieu n’est pas un Dieu des morts, Il est le Dieu des vivants et d’autres vivants qui vivent de façon différente. Si les liens directs entre vivants et défunts sont d’une certaine façon provisoirement rompus, les liens d’amour eux, ne le sont pas. Et la prière des uns, comme celle des autres, pour les uns et pour les autres est efficace, même si nous ne savons pas grand-chose sur ce qui se passe dans l’au-delà. La théorie, en Orient, des douanes que l’on passe après son décès, entre une rangée de démons et une rangée d’anges, comme la théorie occidentale du purgatoire et des indulgences sont destinées à nous inciter à lutter plus activement contre le péché, et n’ont pas valeur de dogme. Soyons plus modestes et convenons que nous ne savons pratiquement rien de ce qui se passe après la mort, sinon que nous entrons dans l’éternité. Le Christ en croix n’a pas dit au Bon larron qu’il allait passer par des douanes ou qu’il effectuerait un séjour au purgatoire – Il lui a dit : « Ce soir, tu seras avec Moi, dans Mon Royaume ». Dieu est hors du temps, alors que nous sommes dans le temps. Cela dérange complètement notre perception des choses.
Dans le credo, nous affirmons notre foi, nous affirmons que nous croyons en Dieu et en un certain nombre d’événements que nous n’avons jamais vus, dont nous n’avons pas été les témoins. Cette foi demande des efforts, et elle suppose une confiance totale en Dieu. C’est le travail de toute notre vie.

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