Dimanche de St Jean Climaque

Le 4-ème dimanche du Grand Carême, l’Eglise fait mémoire de Saint Jean Climaque, un grand saint du 7-ème siècle. A l’âge de 16 ans il est entré comme novice au monastère du Mont Sinaï et a prononcé ses vœux monastiques quatre ans plus tard. A la mort de « l’ancien », c’est à dire à la mort de son guide spirituel, il s’est retiré dans une grotte pour y vivre en ermite pendant près de quarante ans, tout en se rendant de temps à autre dans différents monastères d’Egypte. Des disciples attirés par son rayonnement spirituel venaient lui demander conseil dans son ermitage. Puis on est venu le chercher pour qu’il assure la charge de supérieur du monastère Sainte Catherine au Mont Sinaï. Saint Jean Climaque s’est retiré de nouveau dans le désert vers la fin de sa vie.

Son surnom de Climaque vient du grec et signifie « de l’échelle ». C’est une référence à l’un des deux ouvrages spirituels qu’il a rédigés à l’attention des moines.

Dans le premier ouvrage, l’Echelle sainte, il indique la voie à suivre pour parvenir au Royaume à ceux qui se sont retirés du monde. Dans le second ouvrage– dans « la lettre au Pasteur », il donne des conseils aux supérieurs des monastères pour qu’ils aident les membres de leurs communautés à gravir l’échelle spirituelle qui mène au salut.

Dans les trente « degrés », dans les trente chapitres qui composent l’Echelle sainte, St Jean décrit très en détails les difficultés du parcours qui mène au Royaume. Il passe en revue les passions qui freinent les élans spirituels et détournent ceux qui s’engagent sur la voie du salut. Les occidentaux utilisent un terme réducteur, ils parlent « des péchés capitaux ». Les Pères orientaux de l’Eglise préfèrent utiliser le mot « passion ». Le livre s’adresse presque exclusivement à ceux qui ont prononcé des vœux monastiques. Les renoncements et les efforts proposés ne sont pas adaptés à ceux qui vivent dans le monde. Saint Jean était un maître spirituel sévère et exigeant, et la lecture de son œuvre est réservée à des personnes averties. Mais quelques passages de l’Echelle sainte peuvent cependant nous concerner et nous être utiles, même si nous vivons dans le monde. Il est évidemment impossible de résumer la pensée théologique de Saint Jean Climaque en quelques minutes. Attardons-nous sur deux ou trois points dont nous pouvons tirer profit.

St Jean Climaque commence par insister sur l’importance du guide spirituel que chaque moine doit trouver et auquel il est tenu d’obéir. Tout chrétien a aussi besoin d’être guidé. Les vrais guides spirituels sont malheureusement rares, et l’Eglise russe est allée jusqu’à mettre en garde contre la propension qu’ont certains prêtres à s’auto-promouvoir « starostes », « anciens » ou « géronta ». Ceux qui s’engagent dans une recherche spirituelle ont cependant besoin de conseils qui sont bien utiles. L’on n’est pas à l’abri de dérives quand on ne s’en remet qu’à son propre jugement.

L’obéissance sans faille du moine est une forme de dépouillement, de pauvreté en esprit intégrale, qui n’est pas exigée de celui qui vit dans le monde. A celui qui vit dans le monde, Dieu indique la voie à suivre dans les Ecritures et par l’intermédiaire du guide spirituel, mais Il laisse toujours l’homme libre de ses choix. Si Dieu laisse sa liberté à l’homme, le père spirituel ou le confesseur doit le faire à plus forte raison. Il sert de poteau indicateur de la direction à suivre à celui qui se confie à lui, il sert de témoin dans la relation qui s’établit entre Dieu et l’homme dans le cadre de la confession, mais il ne doit jamais empiéter sur la liberté de celui qui s’est adressé à lui.

Les exigences de St Jean Climaque sont hors de notre portée, encore une fois, il s’adresse à des personnes qui ont choisi la voie monastique. Mais il est aussi conscient de la faiblesse humaine, de la faiblesse des moines, comme de la nôtre.

« Aussi dépendants que nous soyons de nos penchants, – écrit-il, aussi graves que soient les maladies de notre âme, gardons-nous bien de perdre courage ; mettons, au contraire, en Dieu une confiance pleine et entière. Ainsi, alors même que nous nous sentons faibles, soutenus par la fermeté d’une foi inébranlable, présentons-nous devant le Christ, et avec une grande simplicité et une profonde humilité, exposons-Lui notre faiblesse et nos misères, l’abattement de notre âme et de notre corps ; et, tout indignes que nous soyons, Il nous tendra la main avec bonté, et nous prendra sous Sa puissante protection avec une tendre charité ».

A un autre endroit de son « Echelle », Saint Jean met l’accent sur l’absolue nécessité de la foi et il utilise deux exemples très simples. Le premier illustre l’idée que le manque de foi émousse la crainte de Dieu. Des voleurs qui s’apprêtent à commettre un vol s’enfuient par crainte des chiens qui aboient, alors qu’ils n’ont pas été arrêtés par la crainte de Dieu. Ils ne craignent pas Dieu par inconscience ou parce qu’ils ferment délibérément les yeux.

Le deuxième exemple pris par Saint Jean est celui des personnes qui sont plus gênés d’offenser leurs amis que d’offenser Dieu, il prend l’exemple des personnes qui font des efforts pour réparer leurs torts à l’égard d’autrui, alors qu’ils ne demandent pas pardon à Dieu pour les péchés qu’ils ont commis.

De nos jours, Saint Jean dirait que nous craignons davantage la police, les radars ou le jugement des autres que le jugement de Dieu, parce que notre foi est trop faible pour que nous ayons la conscience de la présence permanente de Dieu, parce que cela nous arrange de l’oublier.

Pour en revenir au besoin que tout homme a besoin d’être guidé, la lecture de l’échelle de Saint Jean Climaque peut être très déstabilisante, tant ses conseils sont radicaux. La radicalité de ses conseils était cependant compensée par son discernement – Saint Jean était plus dur dans les objectifs spirituels qu’il fixait que dans sa pratique de paternité spirituelle. Dieu attend de l’homme qu’il recherche la perfection, mais Il tient compte des capacités et des possibilités de chacun. La voie monastique n’est pas la solution pour tout le monde. Il y a autant de voies différentes menant au salut qu’il y a d’hommes, même si la direction est la même. Répondant à l’avance à nos objections, quand nous sommes effrayés par les exigences de perfection, nous qui vivons dans le monde, Saint Jean Climaque écrit : « Ne manquez pas de faire toutes les bonnes œuvres que vos pourrez ; fuyez le mensonge avec horreur ; que l’orgueil ne vous fasse mépriser personne ; n’ayez de haine contre personne ; assistez régulièrement aux offices de l’Eglise ; soyez charitables et bienfaisants pour les pauvres, ne scandalisez jamais vos frères ; respectez la femme de votre prochain, et que chacun de vous se contente de la sienne : si vous agissez et vivez ainsi, vous ne serez pas loin du Royaume des cieux ».

Ce contenu a été publié dans sermon. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Vous pouvez utiliser ces balises et attributs HTML : <a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <strike> <strong>