Dimanche de Zachée

 

            Le dimanche de Zachée annonce l’imminence de l’entrée en carême. A partir de dimanche prochain nous utiliserons le Triode de carême pour tous les offices, et les textes lus, en fait à partir d’aujourd’hui, nous préparent au Grand carême qui, lui-même, est une préparation spirituelle et physique nécessaire pour accueillir le moins mal possible la nouvelle de la Résurrection du Christ.

            L’Evangile de Zachée est riche en enseignements. Dieu invite tous les hommes à entrer au Royaume, les bons, comme ceux qui le sont moins. Zachée ne semble pas être le candidat idéal – il est riche, et le Christ souligne dans de nombreux passages des Evangiles que même si la richesse n’est pas éliminatoire, elle constitue un handicap sérieux. De plus, la richesse de Zachée a été mal acquise – « collecteur d’impôts » est, à l’époque, synonyme de « voleur ». Circonstance aggravante, Zachée est chef des collecteurs d’impôts. Son niveau de corruption est le pire qui puisse être. Autre circonstance aggravante, Zachée, de par sa profession, est un collaborateur des Romains, il est considéré par ses concitoyens comme un traître. Et pourtant, malgré tout cela, c’est à lui que S’adresse le Christ, et c’est chez lui qu’Il s’invite, contrevenant, ainsi à toutes les lois juives sur la pureté. Zachée était infréquentable pour les Juifs pieux. Et leur jugement, du point de vue de la Loi de Moïse, était parfaitement justifié. Pour nous, c’est un encouragement. Dieu est moins sévère dans Ses jugements que les hommes. Et Il laisse toujours leur chance aux pires d’entre nous. Le Christ S’invite chez nous tous, quel que soit notre degré de perfection ou, plus exactement, quel que soit notre degré d’imperfection. Mais il y a un « mais ». Il faut que nous soyons demandeurs – il est écrit que Zachée « cherchait à voir Jésus » – et que nous fassions ce qu’il faut pour accueillir le Christ: Zachée n’a pas eu peur du ridicule, il est monté sur un arbre, aux yeux de tous. Imaginez la scène, actuellement, dans une petite ville de province française où tout le monde connaît tout le monde – quel haut fonctionnaire, connu de tous, monterait sur un arbre pour mieux voir passer un prédicateur ?

            Quand le Christ S’invite chez Zachée, celui-ci l’accueille avec joie. Sa joie est si débordante qu’il fait don aux pauvres de la moitié de ses biens, et promet de rembourser le quadruple de ce qu’il a extorqué à ses victimes. Même s’il n’a tenu qu’une partie de sa promesse, c’est déjà très bien.

            « Les témoins de la scène murmurent », ajoute l’évangéliste. Ils ne comprennent pas comment le Christ a pu S’inviter chez un pécheur aussi notoire. Ces témoins sont peut-être meilleurs, ils sont peut-être plus vertueux que Zachée, mais quel serait leur comportement s’ils avaient le même pouvoir et les  mêmes possibilités de s’enrichir que Zachée ? Quand nous jugeons notre prochain, quand nous le condamnons à l’avance, n’adoptons-nous pas la même attitude que ces témoins ? Et quelles sont les raisons profondes des condamnations que nous portons ? Ne devrions-nous pas plutôt nous occuper de nous-mêmes ?

            La rencontre de Zachée avec le Christ lui a fait opérer une conversion. Il a, peut-être, rejoint la foule des disciples du Christ. En tout cas, il a changé de vie, ce qui est déjà beaucoup. Dans un cas, comme dans l’autre, il nous sert d’exemple. La rencontre collective avec le Christ, comme la rencontre personnelle sont toutes deux indispensables. L’une n’exclue l’autre en aucun cas. Que cette rencontre ait lieu à l’église ou chez soi, dans le cadre d’un office, ou dans celui de la prière individuelle ou de la lecture régulière des Ecritures, chaque rencontre nous rapproche un peu plus de Dieu. Chaque rencontre, si elle est réelle, est source de joie.

            Nos liturgies eucharistiques sont des invitations à double-sens – nous invitons le Christ qui a promis de rendre visite à ceux qui se réuniraient à plusieurs en Son Nom et, dans le même temps, nous nous rendons à Son invitation, à ce qui est une anticipation du Royaume.

            Qui cherche des excuses pour ne pas se rendre à une fête chez des amis ? Suivons l’exemple de Zachée. Répondons aux invitations du Christ non par devoir, mais avec joie. A la longue, nous sentirons que rien n’est plus gratifiant. Même les non-pratiquants, voire parfois les non-croyants ressentent confusément le besoin de célébrer les grands événements de l’existence comme les naissances, les mariages et même les décès à l’église. Ils ne le font plus pour des raisons sociologiques, mais pour combler plus ou moins consciemment un vide. Ne nous contentons pas d’être des pratiquants tièdes, prenons avec reconnaissance ce qui nous est offert en permanence, particulièrement en ce moment de l’année liturgique, où nous commençons à nous préparer au Grand carême, à ce grand nettoyage spirituel de printemps qui nous permettra d’accueillir avec encore plus de joie la nouvelle de la Résurrection du Christ qui préfigure la nôtre.                

 

 

 

 

 

 

 

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