Ga 3, 23-4, 5 Lc 7, 36-50
Trois thèmes majeurs sont abordés dans les lectures daujourdhui : le rapport entre loi et foi, la fraternité entre les hommes qui bouscule les notions habituelles de hiérarchie, et limportance de lamour quil doit y avoir dans la relation entre les hommes et entre lhomme et Dieu.
Avant le Christ, le « peuple élu » était assujetti à la loi. Cette loi a été une nécessité, elle a été un progrès, elle a été une étape dans lévolution de lhumanité. La loi naturelle subie par les descendants dAdam était la loi de la jungle, celle du plus fort. Dieu ne pouvait rester indifférent à leur sort. Dieu a fait prendre à un peuple, quIl a choisi, un chemin qui devait ramener lensemble de lhumanité vers le Royaume. Il aurait pu choisir les Egyptiens qui croyaient en la vie après la mort et semblaient plus aptes que les autres à adopter le monothéisme. Il a préféré choisir les Hébreux pour des raisons que nous ignorons, mais qui étaient nécessairement les bonnes. Les dix commandements ont été la première Loi quIl leur a donnée. Dautres, plus nombreuses, ont suivi. Lensemble a été transmis de génération en génération, dabord sous forme orale, puis écrite.
Les Juifs pieux de lépoque du Christ devaient observer toutes ces lois. Les prophètes, la Mère de Dieu et ses parents, le Christ les ont observées. Ces lois étaient un immense progrès, pourtant saint Paul, un spécialiste en la matière, parle de captivité – nous dirions plutôt un carcan. C’est parce qu’il met laccent sur le côté aliénant de la loi, opposé au côté libérateur de la foi. En fait, la loi nest aliénante que sans la foi. Il nest pas trop difficile dobserver une loi dont on comprend lutilité, et à laquelle on adhère. Les Juifs observaient et observent encore des lois dont ils ne comprennent pas toujours lutilité. Ils le font parce quil le faut, parce que Dieu la demandé. Ils font preuve de foi. Lobservance de la Loi nexclut pas la foi, de même que la foi nexclut pas lobservance de la Loi, quand cest Dieu qui en est lauteur. Lobservation seule de la loi, parce quil le faut, est une première étape. Elle ne garantit pas lentrée au Royaume, parce quatteindre la perfection par la seule observation de la loi est impossible. Heureusement, la foi en la mansuétude de Dieu pallie les insuffisances humaines. La loi est une sorte de mode demploi, mais lentrée dans le Royaume, le résultat attendu, ne peut être atteint quavec laide de Dieu. Lamour couvre une multitude de péchés dit lapôtre. Lobservation de la loi, même si elle est nécessaire, reste inopérante si elle nest pas accompagnée par lamour du prochain, sachant que nous ne pouvons aimer Dieu que nous ne voyons pas, si nous naimons pas notre prochain que nous voyons. En résumé – la loi est nécessaire, mais lamour lest davantage, et lun ne doit pas être un obstacle à lautre.
Lorsquil dit quil ny a plus ni Grec, ni Juif, ni homme, ni femme, ni esclave, ni homme libre, Saint Paul brise un certain nombre de tabous: pour les Juifs, il y avait les Juifs et tous les autres. Pour les Romains, il y avait les citoyens de Rome et tous les autres les barbares. Pour les Romains comme pour les Juifs, il y avait les hommes libres et les esclaves, les hommes et les femmes, même si le sort des femmes et des esclaves était plus enviable chez les Juifs. Le christianisme, par la voix de Saint Paul fait éclater ces distinctions. Cette révolution, pour lépoque, reste actuelle, même si lesclavage et les distinctions raciales revêtent dautres formes dans notre civilisation occidentale.
« Lamour supérieur à lobservance de la loi » est aussi le message apporté par lEvangile daujourdhui. La femme de mauvaise vie qui vient déverser du parfum sur les pieds du Christ est classée dans la catégorie des justes. Elle a enfreint la loi, mais tout lui a été pardonné parce quelle a beaucoup aimé. Elle a beaucoup aimé parce quil lui a été beaucoup pardonné. Sa reconnaissance et son amour pour le Christ sont proportionnels à sa faute. Elle est dautant plus reconnaissante quelle est consciente davoir beaucoup péché, quelle est consciente davoir beaucoup à se faire pardonner. Le pardon quelle vient dobtenir a fait décupler son amour pour le Christ. Cest son amour et son humilité qui lont sauvée. Cest pour cette raison que lEglise a choisi ce passage de lEvangile le jour où lon fête Sainte Marie lEgyptienne, dont le parcours lapparente à celui de la pécheresse que le Christ a pardonnée.
Nous devons observer les commandements de Dieu et les recommandations de lEglise, en acceptant nos chutes et nos échecs spirituels avec humilité et compensant nos insuffisances par notre amour du prochain. Nous devons garder lespoir dêtre sauvés, parce que Dieu est bon et que le Christ est venu pour nous sauver et non pour nous condamner.